Quand un séjour à l'hôpital fait naître un rockeur (Lyon, années 1960)
Né dans une famille mélomane qui le choyait, P. n'était pas un fan de l'école. Les pensionnats privés n'ont pas réussi à lui donner le goût de la scolarité. Jeune adolescent, il avait déjà soif de liberté et de rires, et les pensionnats n'en offraient pas.
Les hôpitaux non plus, à priori. Pourtant, il y trouva une révélation.
P. passa huit mois à l’hôpital avec une cinquantaine d'autres jeunes à la colonne vertébrale tordue comme la sienne, tous contenus dans un plâtre qui les maintenait bien droit. Huit mois qui auraient pu paraître bien frustrants pour un jeune homme de quinze ans. La première opération lui permit de gagner dix centimètres, ce n'était pas une mince joie, et un plâtre à garder en permanence au moins cinq ans. Cette contrainte handicapante ne l'a pas empêché de profiter de ces mois de soins en y cultivant son positivisme et son sens de l'humour. Les infirmières et les dames de ménage ont dû faire preuve de patience et d'autorité pour maintenir l'ordre dans cette bande d'adolescents organisateurs de farces et de blagues nocturnes : poil à gratter ou confiture dans les plâtres des camarades endormis, attaque des chambres éteintes aux seaux d'eau ou aux fromages pourris… Patrick n'était donc pas le moins du monde traumatisé par ces mois d'hospitalisation à l'âge où d'autres promenaient en faisant les jolis cœurs. Il était en vacances d'école et enchaînait les farces, s'était fait une bande de copains de galères et ... il écoutait du rock! La révélation de sa vie venait d'un fond sonore des séances de rééducation. La radio était alors branchée sur « Salut Les Copains ». Une émission de musiques modernes pour les jeunes. Les oreilles de P. n'ont jamais oublié cette nouvelle énergie musicale, inspiré du rock américain.
A tout malheur, quelque chose est bon. Pour lui , cette année scolaire passée à l'hôpital l'avait éloigné de ses amis du lycée technique. La rentrée suivante, équipé de son corset permanent, il fut bien étonné de ne retrouver aucun des visages amicaux habituels. Après enquête, il apprit que ses amis étaient... en prison ! Que s'était-il passé pendant son absence ? Son proche ami, fils du commissaire, avait monté une bande de cambrioleurs et après nombre de vols, ils avaient tous finis au trou! P. avoue qu'il aurait bien pu les suivre dans ce projet. Cette opération avait été un mal pour un bien : il avait gagné des centimètres, évité la prison et pris goût au rock. Il ne tarda pas à monter un groupe avec quelques copains et entama ainsi, sans le savoir, une longue carrière aussi mouvementée que réjouissante dont il y a beaucoup à raconter!
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